Une sculpture d’Ai Weiwei détruite en plein vernissage par un vandale en série

Des débris bleu et blanc éparpillés au sol : ci-gît Porcelain Cube (2009). Ce vendredi 20 septembre, un homme a délibérément réduit en morceaux cette grande sculpture en porcelaine peinte à la main signée Ai Weiwei (né en 1957). La scène s’est déroulée devant des invités médusés, en plein vernissage de « Who am I? », une exposition d’œuvres du célèbre artiste chinois au Palazzo Fava à Bologne, la veille de son ouverture au public.Sur la vidéo enregistrée par une caméra de sécurité, on voit le trublion monter sur le socle de l’œuvre et jeter cette dernière au sol, avant de saisir l’un des débris pour le brandir triomphalement. L’homme est alors aussitôt poursuivi, rattrapé et immobilisé par la sécurité du musée en attendant l’arrivée de la police.« C’est avec regret que je dois commenter l’acte de vandalisme qui a frappé l’œuvre d’Ai Weiwei, un grand artiste et un cher ami », a déclaré Arturo Galansino, curateur de l’exposition et directeur général de la fondation Palazzo Strozzi à Florence, dans un message à l’AFP. Ai Weiwei « était préoccupé de savoir si quelqu’un s’était fait mal, et a demandé d’emporter les restes de son œuvre », a-t-il précisé. Les débris ont depuis été remplacés par une photographie de la sculpture avant dégradation.
Ses précédentes cibles :
Les œuvres de Marina Abramović et d’Urs Fischer
Le coupable – un Tchèque de 57 ans du nom de Vaclav Pisvejc, qui se définit comme « un artiste contestataire », selon le quotidien italien Corriere della Sera – n’en est pas à son coup d’essai. En 2018 à Florence, il avait attaqué la performeuse serbe Marina Abramović en fracassant un tableau sur son crâne, et pulvérisé de la peinture rouge sur une sculpture en bronze d’Urs Fischer, Big Clay, installée devant le Palazzo Vecchio, piazza della Signoria. En 2022, toujours sur cette célèbre place, il avait mis le feu à un drap noir qui recouvrait, en signe de soutien à l’Ukraine, la fameuse copie de 1910 du David de Michel-Ange (1501–1504), causant 15 000 euros de dégâts à cette dernière – ce qui lui avait valu une amende et six mois de prison –, et avait barbouillé de jaune et de bleu (couleurs de l’Ukraine) le lion de l’artiste contemporain Francesco Vezzoli. En 2023, il était revenu sur les lieux, cette fois pour escalader, le mot « censuré » peint sur son corps nu, la statue Hercule et Cacus de Baccio Bandinelli (1525–1534).Un geste en réponse à celui d’Ai Weiwei ?Plusieurs œuvres d’Ai Weiwei revisitent la traditionnelle porcelaine chinoise bleu et blanc, née il y a 1 000 ans, pour interroger notre rapport avec le passé, la tradition et la culture chinoise. L’artiste a par exemple créé des vases qui de loin ressemblent à des antiquités classiques, mais sont en réalité ornés de scènes contemporaines impliquant des migrants. Dans l’une de ses œuvres les plus célèbres, un triptyque de trois photographies datant de 1995 (présent dans l’exposition de Bologne), il se met en scène en train de lâcher un vase ancien de la dynastie Han pour le laisser se briser au sol. Un geste iconoclaste qui le montre en train de se libérer du poids des traditions.Le Tchèque faisait-il référence à cet acte artistique du plasticien chinois ? En 2014 au Pérez Art Museum de Miami (PAMM), un autre homme se revendiquant artiste avait brisé un vase à 1 million de dollars qui faisait partie d’une installation d’Ai Weiwei comprenant ces photos de 1995 et des vases chinois anciens repeints dans des couleurs vives. « Je l’ai fait pour tous les artistes locaux qui n’ont jamais été exposés dans les musées locaux, avait alors expliqué le vandale. C’était une protestation spontanée, j’ai vu la photo d’Ai Weiwei qui lâche un vase chinois ancien et le casse. J’ai pris ça comme un provocation de Weiwei à en faire de même ». Des explications que l’artiste chinois avait jugées « injustes ». Suite à la mésaventure de Bologne, le plasticien a déclaré que toute destruction d’une œuvre exposée au public était à ses yeux, « quelle qu’en soit la motivation », « inacceptable ».




