Tsunami de l’intelligence artificielle

Le tsunami de l’intelligence artificielle divise les usagers entre emballement et craintes. L’IA menace certains métiers.Un mot, celui d’intelligence artificielle ou IA, dit-on, comme s’il s’agit d’un code pour les seuls initiés, est en train de prendre de plus en plus de place dans nos discussions et bientôt dans notre vie quotidienne. Le phénomène suscite autant d’emballement que de craintes. Pour beaucoup de personnes, l’homme ne sera plus ce qu’il était et les bouleversements ouvrent, pour les plus pessimistes, un précipice.Robots et machines intelligentes n’apparaissent pas uniquement dans des films de science-fiction qui amusent ou effraient. Ces 2 dernières années, notamment après le lancement, fin 2022, par la start up Open IA de ChatGPT, notre façon de travailler a changé. Ici, quelques témoignages de celles et de ceux qui ont y recours.
Gain de temps
Lounis, qui travaille au sein de la direction de la BADR à Belcourt, se sert tous les jours de différentes applications d’IA. Pas seulement ChatGPT qui, selon lui, peut, à sa simple demande, adapter ses questions et affiner ses réponses. Quand il en parle, il entrouvre les portes d’un univers où la rivalité entre Google, Microsoft et d’autres acteurs de la high tech fait rage. Pour lui, tous ces outils permettent de gagner beaucoup de temps. Quand il rédige un rapport ou s’il a besoin d’une synthèse, il ne perd plus des heures et des heures.«Souvent, nous recevons également des ADT (avis au détenteur tiers) pour savoir si telle société peut s’acquitter de ses dettes vis-à-vis du fisc. Un simple clic suffit alors pour régler le problème, car on a toutes les informations», assure-t-il. «Désormais, s’agissant de l’élaboration des rapports, l’IA générative me suggère des recommandations et m’ouvre de nouvelles pistes», ajoute-t-il. Au point que l’avenir de son métier lui paraît menacé avec l’accélération des inventions qui mettent moins de temps que celles de la révolution industrielle.Qui aurait imaginé que le métier de comptable est aussi dans l’œil de ce «tsunami» qui risque de tout emporter Abdenour, qui travaille à Sonelgaz, sait de quoi il parle. Selon lui, la machine peut effectuer, en quelques secondes, des calculs qui nous exigeaient des journées entières. «On peut avoir plein de ratios (de rentabilité), obtenir des écritures comptables», confie-t-il. Abdenour n’a plus besoin de calculatrice. Son ordinateur a tout remplacé, les applications lui laissent l’embarras du choix.
Des métiers menacés
Cette 4e révolution industrielle, comme la désignent les spécialistes qui comparent ses incidences à celles de l’électricité, ouvre des perspectives inouïes et suscitent des craintes justifiées avec le risque de voir disparaître des métiers comme celui de médecin ou de traducteur qui se maintient, nous dit l’un d’eux, que «parce que nous possédons des cachets». «Sinon un texte est traduit en moins de temps qu’il faut pour le rédiger», fait-il remarquer.Le métier de journaliste en est frappé aussi de plein fouet. «Je ne passe pas au service documentation, j’utilise ChatGPT pour rédiger mes articles», reconnaît un jeune recruté par une chaîne de radio. «La dernière fois, on m’a demandé 3.500 signes sur l’émir Abdelkader. ChatGPT m’a offert de quoi écrire 20.000 signes», ironise-t-il.Déjà qu’avec Google qui diffuse des vidéos de la plupart des activités on peut se dispenser d’assister à celles-ci. Le reporter qui se déplace sur le terrain pour décrire une atmosphère, rencontrer et faire parler des gens appartient à une époque révolue. «Nous n’allons vers l’information, c’est elle qui déferle, comme un tsunami, sur nous», analyse un «ancien» qui perd pied dans ce nouveau monde.Écoles et universités ne sont plus ce qu’elles étaient. Les modalités de transmission du savoir et d’acquisition des connaissances sont chamboulées. L’étudiant ou le lycéen studieux qui va d’une bibliothèque à une autre fait sourire aujourd’hui. Étudiante en 2e année de licence à l’Institut d’anglais de l’Université Alger 2, Hanane compte beaucoup sur ChatGPT. «My precious friend», dit-elle avec un air ironique et le sourire aux lèvres. Elle lui demande le sens d’un mot, d’une expression, et il s’exécute.