Bamako à genoux, que fera Goita ?

La crise des carburants que provoque le groupe terroriste JNIM pour asphyxier le Mali démontre la vulnérabilité des autorités maliennes devant cette nouvelle stratégie de prise de contrôle des axes routiers d’approvisionnement de la capitale, Bamako. A tel point que des chancelleries commencent à quitter la capitale malienne pour des raisons de sécurité. Après les Etats-Unis, l’Australie, le Canada, l’Allemagne et la France, l’Egypte rejoint le cortège en invitant ses diplomates et ses ressortissants à être prudents. Ce qui est un indice de perte de confiance en Bamako et ses dirigeants au point de la quitter en créant une atmosphère de méfiance contagieuse. La situation ne dément cependant pas cette réalité que vivent les Maliens confrontés à une pénurie de carburant et ses effets sur les activités économiques du pays et met les autorités devant une responsabilité qui semble jusqu’à présent les dépasser. Bamako est en effet sous pression depuis plusieurs semaines et le gouvernement n’a rien pu faire pour lever le blocus de Tombouctou et Sikasso. Le président de la transition, le général Assimi Goita promettait une réaction ferme contre les terroristes se contenant cependant de présenter des bilans de quelques victoires qui n’ont pas changé la tendance. Bien au contraire, le JNIM a étendu son blocus à d’autres villes poussant souvent la population à l’exode pour échapper aux violences. Le Jnim découvre l’autre point faible de Bamako, les convois de carburant, qu’il attaque pour priver le pays de sources d’énergie et l’étouffer économiquement. Le gouvernement se réunit, promet d’apporter des solutions. Mais le spectacle des longues files d’attente sous un soleil de plomb devant les stations-service ne cesse de se prolonger.L’incendie arrive aux portes de Bamako lorsque les terroristes attaquent un convoi de carburant escorté par l’armée. Ses soldats ont été tués et des camions-citernes brûlés. L’évaluation de la situation est sans appel. Les Etats-Unis émettent une alerte à l’adresse du personnel de leur ambassade à Bamako et des ressortissants américains les invitant à « quitter immédiatement » le Mali. D’autres pays suivent l’alerte pour les mêmes « raisons sécuritaires ».
Un pays isolé
Le Mali s’est retrouvé ainsi isolé. Son président aussi. Assimi Goita s’est attaché pendant cinq ans à renforcer son propre pouvoir agissant comme un soldat plus soucieux de neutraliser ses adversaires que de l’amélioration de la situation sécuritaire et économique de son pays. Il commencera par atomiser les acteurs de la sphère civile qui ont soutenu le coup d’Etat en s’attaquant aux partis politiques qu’il dissout, aux associations et aux syndicats pour se retrouver seul maître de Bamako mais sans aucune vision. Sa méfiance a été telle qu’il a ciblé de hauts officiers qu’il soupçonnait de vouloir le destituer et de revoir la configuration de la hiérarchie des FaMa.Les prémisses de sa paranoïa sont apparues lorsqu’il a fait appel au groupe privé russe de sécurité Wagner devenu ensuite Africa Corps pour soutenir l’armée malienne dans son combat contre le terrorisme avant de le charger de la sécurité de Bamako et de sa propre sécurité. Cette sous-traitance sécuritaire l’a précipité dans les bras des Emirats arabes unis qui lui assurent le financement… jusqu’à cette semaine où le micro Etat impliqué dans bien des drames au Moyen-Orient et en Afrique, se rend coupable de paiement d’une rançon estimée entre 50 et 70 millions de dollars en plus d’un lot d’armements et de véhicules militaires pour la libération de trois otages, deux Emiratis et un iranien. Les Emirats renforcent ainsi les capacités financières du Jnim pour, entre autres, renforcer ses rangs avec de nouvelles recrues. Des travailleurs indiens ont été enlevés à peine l’information sur le paiement de la rançon rendue publique. Ce qui renforce le climat d’insécurité dans le pays et réduit la marge de manœuvre du général Goita qui doit, naturellement, reconnaître son échec et décider de « revenir à l’ordre constitutionnel » après avoir mené le Mali vers le chaos. Ou devra-t-il attendre la chute de Bamako pour offrir le pays aux islamistes du Jnim, le même groupe estampillé alors Anser Edine qui avait lancé en 2013, partant de Kidal, une offensive pour prendre Bamako. Le groupe a été stoppé par l’intervention militaire française. A la différence qu’aujourd’hui, Assimi Goita a vidé le Mali de ses puissants alliés et soutiens.




