60E ANNIVERSAIRE DE L’INDEPENDANCE : Yahia Fares, le médecin martyr de la wilaya IV historique
Le martyr Yahia Fares, médecin militaire au sein de la wilaya IV historique, fait partie de cette élite qui a choisi, durant la guerre de libération nationale, le sacrifice suprême à la gloire, la renommée et les privilèges de la fonction, affirme le moudjahid Fouad Chaouati, ancien officier dans cette même wilaya historique. « Yahia Fares a suivi le chemin emprunté, avant lui, par d’autres médecins algériens qui travaillaient dans des hôpitaux français ou possédaient leurs cliniques, vivaient confortablement, mais qui ont tout abandonné pour soutenir leurs frères d’arme. Il a renoncé au confort que lui procurait son métier et à son rang social pour être au plus près de la population, proche de ses souffrances, et la servir au mieux », a souligné le moudjahid Chaouati. A l’instar de Mohamed Lamine Debaghine, Lamine Khène, Benyoucef Benkhedda, Benaouda Benzerdjab et Lakhdar Abdelsalam, des médecins à la réputation établie, Yahia Fares a « troqué sa blouse blanche contre l’uniforme de l’Armée de libération nationale (ALN) pour soigner les combattants blessés et aider les populations civiles opprimées », a-t-il dit. Yahia Fares, de son vrai nom Benmokrane Benmouloud, subit dès son jeune âge l’influence de son père qui exerçait comme infirmier dans la ville de Medjana, à Bordj-Bou-Arreridj. C’est auprès de lui qu’il découvre la noblesse de ce métier et décide de suivre les pas de son père, affirme le docteur Moussa Hissam, doyen de la faculté des sciences humaines et sociales de l’université Yahia Fares de Médéa. Après avoir décroché son baccalauréat à Constantine, Yahia Fares part en France pour poursuivre des études de médecines à l’université de Montpelier (Sud de la France) où il passe quelques années, mais se voit contraint d’abandonner ce rêve, après le déclenchement de la guerre de libération, poursuit le docteur Hissam. Formé à l’école des Scouts musulmans algériens, pépinière du mouvement national, Yahia Fares est resté fidèle à l’idéal de s’affranchir du joug colonial, malgré son éloignement du pays, note cet universitaire, rappelant que son attachement à la cause nationale le pousse à intégrer les rangs de la Fédération de France du FLN où il continua à militer, en secret, en faveur de l’indépendance du pays. En 1957, il décida de mettre un terme à ses études et de rentrer en Algérie pour participer au combat libérateur. Il rejoint la base de la frontière ouest de l’ALN, avant de se retrouver dans les maquis de la wilaya V (5) historique, explique le docteur Hissam. Après un bref séjour sans cette wilaya historique, Yahia Fares se déplace vers les maquis de la wilaya IV historique ou il va s’installer définitivement jusqu’à sa mort, le 11 juillet 1960. Désigné, à son arrivée médecin militaire responsable du staff médical opérationnel dans les maquis de la wilaya IV (4) historique, le docteur Yahia Fares est nommé, peu de temps après, inspecteur général du secteur sanitaire de la dite wilaya, ajoute cet universitaire. La docteur Yahia Fares supervisait plus d’une vingtaine de centres de santé et d’infirmeries disséminés à travers le territoire de la wilaya IV historique, et pouvait compter dans cette mission sur l’appui de plusieurs médecins et d’infirmiers et infirmières qui avaient fait leurs preuves sur le terrain. Le moudjahid Fouad Chaouati relève, à ce sujet, que les blessés graves et les brulés au Napalm étaient pris en charge directement par le docteur Yahia Fares qui, en dépit du peu de moyens médicaux dont il disposait, opérait sur place ces blessés et réussissait à sauver nombre d’entre eux. En sus de son dévouement total pour ses compatriotes blessés pendant la guerre contre le colonialisme français, Yahia Fares assurait la formation de l’encadrement médical de la wilaya IV historique, ajoute le moudjahid, affirmant que l’un des grands mérites de ce martyr est d’avoir mis en place un centre de formation paramédical au sein des maquis pour former des infirmiers qui vont être affectés, par la suite, dans les différentes zones de combat. C’est après avoir été blessé lors d’un accrochage avec les troupes coloniales que Yahia Farès fut incarcéré au centre de détention de Damiette où il subit d’atroces sévices physiques pour le forcer à dénoncer ses compagnons et livrer à l’ennemi des informations sur la localisation des troupes de l’ALN et l’endroit où se trouve la commandement de la wilaya IV historique. Le quartier de Damiette, à la périphérie de Médéa, est la dernière « escale » du martyr Yahia Farès, dont la voix fut étouffée à jamais, il y a 62 ans, jour pour jour, le 11 juillet 1960, dans les geôles du tristement célèbre centre colonial de détention érigé dans ce quartier. Ses tortionnaires n’obtiennent rien de lui, malgré leur acharnement et leur cruauté. Le supplicié préfère mourir en martyr que de trahir ses compagnons d’armes. Il meurt sous la torture, peu de temps après son incarcération, comme nombre de combattants et de civils qui ont transité par ce centre de détention, relève le moudjahid Chaouati.